Passerelle vers la profession d’avocat : la réglementation française est-elle conforme au droit de l’UE ?
L'Avocat général, Michal Bobek, dans ses conclusions rendues ce mercredi 16 septembre, se penche sur la réglementation française qui fixe les conditions permettant de bénéficier de la dispense de formation et de diplôme pour exercer la profession d'avocat. Et selon lui, les conditions pour bénéficier, en France, de cette dispense sont contraires au droit de l'UE. En effet, l'accès à une profession réglementée dans un État membre ne peut être subordonné à des conditions qui ne sont pas fondées sur des critères cohérents et prévisibles et qui ne sont pas raisonnablement déterminables préalablement par tous les demandeurs intéressés.
Une fonctionnaire de la Commission UE a demandé son inscription au Barreau de Paris et à bénéficier de la dispense de formation et de diplôme pour les fonctionnaires de catégorie A ou des personnes assimilées à ces fonctionnaires, ayant exercé en cette qualité des activités juridiques pendant au moins 8 ans dans une administration, un service public ou une organisation internationale (
La cour d’appel de Paris a estimé que, pour déterminer s'il peut bénéficier de cette dispense, l'expérience professionnelle du candidat à l'accès à la profession d'avocat devait être appréciée in concreto. Elle a notamment relevé que la volonté de veiller à une connaissance satisfaisante par l'avocat du droit national a pour objectif de garantir l'exercice complet et efficace des droits de la défense (
La Cour de cassation saisie du litige a posé plusieurs questions préjudicielles à la CJUE concernant la conformité au droit de l'UE de 2 des 3 conditions posées par les juridictions françaises pour accorder le bénéfice de la dispense en cause : celle de l'exigence d'une pratique professionnelle du droit français sur le territoire français et celle de l'appartenance à la fonction publique française (
- si le principe de l'intégration directe du droit de l'Union dans les ordres juridiques nationaux s'oppose à une réglementation nationale qui fait dépendre le bénéfice d'une dispense des conditions de formation et de diplôme prévues pour accéder à la profession d'avocat d'une connaissance suffisante du droit français, excluant, de ce fait, la prise en compte d'une connaissance similaire du seul droit de l'UE ;
- si le principe de non-discrimination s'oppose à la réglementation française qui réserve le bénéfice d'une dispense aux seuls fonctionnaires et agents de la fonction publique de cet État membre, ayant exercé, en cette qualité, des activités juridiques dans la fonction publique nationale.
L'Avocat général reconnaît que les États membres disposent d'un important pouvoir d'appréciation pour définir les conditions d'accès à une profession réglementée comme la profession d'avocat, y compris les dispenses de ces conditions, pour garantir que seules des personnes offrant les garanties de compétences requises puissent y avoir accès. Toutefois, l'État membre doit procéder d'une manière cohérente et transparente, en soumettant tous les candidats, qu'ils soient citoyens ou non, à la même série de conditions prévisibles qui doivent s'appliquer de la même manière. Un État peut décider d'être clément ou d'être strict, mais il doit le faire sans discrimination. En revanche, un État membre ne peut pas, au travers d'un système de présomptions à peine justifiées n'ayant qu'un lien limité avec l'objectif déclaré, à savoir l'expérience pertinente (objectif en soi indifférent à la nationalité), gérer efficacement un système qui, s'agissant de tous les faits portés devant la Cour, s'avère relativement clément avec ses propres citoyens, alors qu'il est beaucoup plus strict avec ceux qui ne le sont pas, au point parfois de les exclure.
Il propose donc à la Cour de répondre à la Cour de cassation de la manière suivante :
- les
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