Publication d'une circulaire en matière de justice pénale environnementale
Dans sa circulaire de politique pénale du 9 octobre adressée à l'ensemble des parquets, le garde des Sceaux vient préciser les moyens mis en œuvre pour donner au contentieux pénal environnemental au sein des juridictions une place à la hauteur des enjeux cruciaux qui sont les siens. Ce faisant, elle actualise les orientations de politique pénale autour du renforcement de la coordination de l’action administrative et judiciaire à travers le déploiement des comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (COLDEN), du renforcement de l’efficacité des enquêtes judiciaires traitant des atteintes à l’environnement et de la mise en œuvre d’une réponse pénale ferme et adaptée en cette matière.
La circulaire aborde notamment le rôle des COLDEN et leur articulation avec les pôles régionaux environnementaux (PRE) dont elle entend faciliter le développement et précise l’implication et le rôle central du procureur de la République dans l’activité du COLDEN.
Elle insiste en outre sur la nécessité de développer des stratégies d’enquête adaptées qui permettent aux policiers d’intervenir en cosaisine avec des fonctionnaires et agents habilités des administrations spécialisées afin de disposer d’une expertise sur des contentieux environnementaux pointus qui nécessitent une connaissance de la matière spécifique et d’avoir une compréhension de la procédure dans sa globalité. À cet égard, figure en annexe de la circulaire un focus de la DAGC présentant les principaux acteurs en matière environnementale et exposant leurs périmètres d’intervention, missions et organisation ainsi qu'une fiche sur le contentieux particulier du dépôt sauvage, du trafic et du stockage illicite des déchets.
Afin de renforcer la répression en matière de criminalité environnementale, les parquets sont également priés, lorsque les conditions sont réunies, de relever l’existence de qualifications pénales assorties de la circonstance aggravante de bande organisée, celle-ci permettant de convoquer les techniques spéciales d’enquête du Code de procédure pénale (surveillance, infiltration, sonorisation, interception de correspondances, captation des données, sonorisation et fixation d’images des lieux privés) portant sur « la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisées et aux crimes » ().
La circulaire prône également des actions de formation ciblées et étendues au service d’une « acculturation environnementale » à destination des magistrats et des fonctionnaires et agents des administrations spécialisées et rappelle le rôle à jouer du magistrat référent chargé du traitement du contentieux de l’environnement et investi au sein de chaque parquet et parquet général dans la mise en place de telles formations.
Concernant enfin la mise en œuvre d’une réponse pénale ferme et adaptée, la circulaire rappelle la nécessité de rechercher systématiquement la remise en état de l’environnement auquel il a été porté atteinte et la poursuite des auteurs réitérant ou ayant commis des atteintes graves.
Elle plaide également pour le développement du recours à la convention judiciaire d’intérêt public environnementale (CJIPE). L’opportunité pouvant s’apprécier en fonction de plusieurs critères : caractère spontané de la révélation des faits, degré de coopération en vue de la régularisation de la situation et / ou de la réparation du préjudice écologique, antécédents judiciaires – l’engagement de poursuites pénales devant être privilégié en cas de réitération de faits graves afin de donner toute sa dimension dissuasive à la condamnation publique recherchée. La circulaire insiste aussi sur l'information de la victime identifiée concernant la procédure de CJIPE en cours afin qu'elle puisse faire valoir son préjudice et des associations agréées du ressort qui souhaiteraient se porter partie civile. Elle précise que le cumul : versement d’une amende au Trésor public+ régularisation de la situation de la personne morale avec mise en place d’un programme de mise en conformité précis + réparation du préjudice écologique + indemnisation de la victime, doit, autant que faire se peut, être mobilisé.
La circulaire insiste aussi sur le caractère pédagogique que doit revêtir la réponse pénale pour les infractions de basse intensité (stages de citoyenneté à contenu spécialisé et mesures de travaux non rémunérés à vocation écologique).
En parallèle, au regard enfin des enjeux financiers souvent inhérents à ce contentieux et parce que « la rationalité économique doit s’inverser, et le coût d’un comportement négligent – voire sciemment attentatoire à la préservation de nos ressources et de notre patrimoine naturel – devenir prohibitif » , les parquets sont appelés, en sus des infractions en matière environnementale, et le cas échéant lorsque les procédures le justifieront, de relever de manière systématique les infractions de faux et d’usage de faux lorsqu’elles sont constituées, de rechercher si les faits sont en lien avec des infractions relatives au travail illégal, à l’escroquerie, au blanchiment ou à la corruption et de s'assurer de la réalisation d’enquêtes patrimoniales approfondies dans ces procédures et de la saisine de l’AGRASC.