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Directive anti-blanchiment : les informations sur les bénéficiaires effectifs des sociétés ne peuvent être accessibles sans limites

Jurisprudence

Opérant un contrôle de proportionnalité entre la nécessaire transparence de données dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et la tout aussi nécessaire protection de droits fondamentaux, les juges de la CJUE, réunis en grande chambre, ont déclaré la directive anti-blanchiment de 2015 partiellement contraire à la Charte des droits fondamentaux de l'UE. Plus précisément, la disposition du texte prévoyant que les informations sur les bénéficiaires effectifs des sociétés constituées sur le territoire des États membres soient accessibles dans tous les cas à tout membre du grand public est invalide. L'ingérence dans les droits garantis par la Charte que comporte cette mesure n'est ni limitée au strict nécessaire ni proportionnée à l'objectif poursuivi.

Une loi luxembourgeoise adoptée en 2019 a institué un Registre des bénéficiaires effectifs et prévoit que toute une série d'informations sur les bénéficiaires effectifs des entités immatriculées doivent y être inscrites et conservées. Une partie de ces informations sont accessibles au grand public, notamment par Internet. Cette loi prévoit également la possibilité qu'un bénéficiaire effectif demande à Luxembourg Business Registers (LBR), le gestionnaire du Registre, de limiter l'accès à de telles informations dans certains cas. Elle est prise sur le fondement de la directive anti-blanchiment du 20 mai 2015 (PE et Cons. UE, dir. (UE) 2015/849, 20 mai 2015, art. 1er, 15. c). Le tribunal luxembourgeois est saisi de deux recours introduits respectivement par une société luxembourgeoise et par le bénéficiaire effectif d'une telle société, lesquels avaient demandé, sans succès, à LBR de limiter l'accès du grand public aux informations les concernant.

La question que soulève le juge luxembourgeois devant la Cour de Justice est celle de savoir quel est le juste équilibre entre, d'une part, l'exigence de transparence en ce qui concerne les bénéficiaires effectifs et les structures de contrôle des sociétés, qui joue un rôle fondamental dans le cadre de la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et, d'autre part, le respect des droits fondamentaux des personnes concernées, à savoir les bénéficiaires effectifs, et, notamment, de leurs droits au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel.

Dans son arrêt rendu en grande chambre, la Cour constate l'invalidité de la disposition de la directive anti-blanchiment prévoyant que les États membres doivent veiller à ce que les informations sur les bénéficiaires effectifs des sociétés et autres entités juridiques constituées sur leur territoire soient accessibles dans tous les cas à tout membre du grand public. Elle considère que l'accès du grand public aux informations sur les bénéficiaires effectifs constitue une ingérence grave dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel, respectivement consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

La Cour relève que le législateur de l'Union vise, par la mesure en cause, à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, en mettant en place, au moyen d'une transparence accrue, un environnement moins susceptible d'être utilisé à ces fins. Elle considère que le législateur poursuit ainsi un objectif d'intérêt général susceptible de justifier des ingérences, mêmes graves, dans les droits fondamentaux consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte, et que l'accès du grand public aux informations sur les bénéficiaires effectifs est apte à contribuer à la réalisation de cet objectif. Cependant, l'ingérence que comporte cette mesure n'est ni limitée au strict nécessaire ni proportionnée à l'objectif poursuivi.

Outre le fait que les dispositions en cause autorisent la mise à la disposition du public de données qui ne sont pas suffisamment définies ni identifiables, le régime introduit par la directive anti-blanchiment représente une atteinte considérablement plus grave aux droits fondamentaux garantis par la Charte que le régime antérieur (lequel prévoyait, outre l'accès des autorités compétentes et de certaines entités, celui de toute personne ou organisation capable de démontrer un intérêt légitime), sans que cette aggravation soit compensée par les bénéfices éventuels qui pourraient résulter du nouveau régime par rapport à l'ancien, en ce qui concerne la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. En particulier, l'existence éventuelle de difficultés pour définir précisément les hypothèses et les conditions dans lesquelles existe un tel intérêt légitime, invoquées par la Commission, ne saurait justifier que le législateur de l'Union prévoie l'accès du grand public aux informations en question.

La Cour ajoute que les dispositions facultatives qui permettent aux États membres, respectivement, de conditionner la mise à disposition des informations sur les bénéficiaires effectifs à une inscription en ligne et de prévoir, dans des circonstances exceptionnelles, des dérogations à l'accès du grand public à ces informations ne sont, par elles-mêmes, pas de nature à démontrer ni une pondération équilibrée entre l'objectif d'intérêt général poursuivi et les droits fondamentaux consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte ni l'existence de garanties suffisantes permettant aux personnes concernées de protéger efficacement leurs données à caractère personnel contre les risques d'abus.