Augmentations de capital en SAS : fin de la saga !
Dans cet arrêt, marquant la fin d’un « passionnant combat de Titans » (
Pour rappel, lors d’une l'assemblée générale extraordinaire, les associés d’une SAS avaient décidé, avec 46 % des voies, d'augmenter le capital social par l'émission de nouvelles actions, de supprimer le droit préférentiel de souscription des associés et de réserver l'émission des nouvelles actions à la SARL présidant cette société.
L’un des détenteurs du capital de la SAS, rejoint par deux autres détenteurs du capital, a assigné la SAS, ses associés, et la SARL en annulation de la délibération relative à la décision d’augmenter le capital de la SAS.
La cour d’appel de Paris, sur renvoi après cassation (
Après renvoi par la chambre commerciale de l’examen du pourvoi devant l’assemblée plénière (
Elle casse ainsi, au visa des articles 1844, alinéa 1er , et 1844-10, alinéas 2 et 3, du Code civil, et de l', l’
Par une approche particulièrement didactique, la Cour rappelle d’abord trois règles élémentaires :
-
aux termes du premier texte du visa, « tout associé a le droit de participer aux décisions collectives » ;
-
selon le deuxième, « toute clause statutaire contraire à une disposition impérative du titre IX du livre III du code civil dont la violation n'est pas sanctionnée par la nullité de la société est réputée non écrite. Les actes et délibérations des organes de la société pris en violation d'une telle disposition peuvent […] être annulés » ;
-
selon le dernier, « les statuts de la [SAS] déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu'ils prévoient. Toutefois, les attributions dévolues aux assemblées générales extraordinaires et ordinaires des sociétés anonymes, en matière d'augmentation, d'amortissement ou de réduction de capital, de fusion, de scission, de dissolution, de transformation en une société d'une autre forme, de nomination de commissaires aux comptes, de comptes annuels et de bénéfices sont, dans les conditions prévues par les statuts, exercées collectivement par les associés ».
Puis, par une affirmation des plus claires, elle énonce qu’« une décision collective d'associés ne peut être tenue pour adoptée que si elle rassemble en sa faveur le plus grand nombre de voix ».
Cette question avait, pour mémoire, fait l’objet d’une audience filmée d’assemblée plénière, au cours de laquelle deux thèses s’opposaient : celle tenant à faire prédominer la liberté contractuelle, si chère aux SAS ; et celle tendant à encadrer les modalités d’adoption des décisions relatives aux augmentations de capital.
L'assemblée plénière explique d’abord cette position par une raison technique, en précisant que retenir une règle contraire reviendrait à considérer que « la collectivité des associés peut adopter, lors d'un même scrutin, deux décisions contraires ».
Elle répond ensuite à l’argument plus juridique tenant à la liberté contractuelle bien connue des SAS et justifiant qu’elle soit devenue, en 2024, la première société commerciale en France, devant la SARL (au 29 septembre 2024, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce dénombrait 1.727.051 SCI ; 1.642.548 SAS ; et 1.633.751 SARL). En effet, comme le rappellent des auteurs, « le libéralisme le plus complet prévaut […] en ce qui concerne la préparation et la forme de la décision collective ainsi que pour les modalités d'initiative, de délais et de preuve. Les conditions de majorité sont en principe fixées librement » (
Indépendamment de ces situations, il ressort du dernier article visé par la Cour, l’, que les statuts peuvent librement définir les majorités requises pour la prise d'une décision.
Partant, si liberté il y a, c’est bien pour déterminer les règles de majorité , et non seulement les règles d’adoption des décisions. Dit autrement, et tel que le précise clairement la Haute Juridiction : la liberté contractuelle qui régit la société par actions simplifiée ne peut s'exercer que dans le respect de la règle selon laquelle « une décision collective d'associés ne peut être tenue pour adoptée que si elle rassemble en sa faveur le plus grand nombre de voix ».
Dès lors, et assez logiquement, la décision collective d'associés d'une SAS, prévue par les statuts ou, précise l’assemblée plénière, imposée par la loi, ne peut être valablement adoptée que si elle réunit au moins la majorité des voix exprimées, toute clause statutaire contraire étant réputée non écrite.
Cette solution, empêchant qu’une clause statutaire n’érige une minorité qualifiée en condition permettant l'adoption de décisions collectives, sera sans nul doute saluée par la doctrine, qui avait qualifié cette même position, adoptée par la chambre commerciale le 19 janvier 2022 de « salutaire » en ce qu’elle permet d’éviter de « favoriser les tensions et l'instabilité » (