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Les réformes du droit des sûretés et du droit des entreprises en difficulté sont présentées en Conseil des ministres

Attendues initialement pour la mi-juillet 2021, les réformes du droit des sûretés et du droit des entreprises en difficulté ont été finalement présentées lors du Conseil des ministres du mercredi 15 septembre 2021.

  • Une ordonnance portant réforme du droit des sûretés.

Prise sur le fondement de la loi PACTE du 22 mai 2019 (L. n° 2019-486, 22 mai 2019, art. 60), elle poursuit trois objectifs principaux :

- le premier est celui de la sécurité juridique, en rendant plus simple, plus lisible, et donc plus prévisible, le droit des sûretés. Ainsi, la réforme modernise les textes et rassemble dans le Code civil les règles du droit des sûretés, qui étaient éparpillées dans divers codes et lois. Par exemple, le bénéficiaire d'un cautionnement pouvait être tenu d'informer chaque année la caution de l'évolution de la dette principale en vertu de trois textes différents qui prévoyaient chacun une date, un contenu et une sanction spécifiques ; désormais, un seul texte subsiste dans le Code civil. Par ailleurs, les sûretés portant sur des sommes d'argent, massivement utilisées en pratique sans fondement légal, sont désormais régies par le Code civil ce qui permet d'encadrer cette pratique et donc de la sécuriser ;

- le deuxième objectif est le renforcement de l'efficacité des sûretés. Celles-ci ont précisément pour objet de permettre au créancier d'être désintéressé en cas de défaillance du débiteur. La réforme encadre les motifs de contestation de son engagement par la caution. En outre, le gage pourra désormais porter sur des « immeubles par destination », par exemple sur des panneaux solaires ou des turbines d'éoliennes, ce qui facilitera le financement des infrastructures. Enfin, toutes les sûretés pourront être conclues par la voie électronique, ce qui était impossible jusque-là. Cette innovation permettra aux entreprises de poursuivre leur transformation numérique et de réaliser d'importantes économies. Conformément aux termes de l'habilitation donnée par le Parlement, l'ordonnance maintient un niveau de protection élevé des personnes qui s'engagent en qualité de garant, et spécialement des personnes physiques qui se portent caution. Cette protection est essentielle afin de lutter contre le surendettement. À titre d'exemple, la mention que doit aujourd'hui rédiger la caution est simplifiée pour des raisons d'efficacité mais étendue à toutes les personnes physiques quelle que soit la qualité du créancier, ce qui étend la protection des cautions ;

- le dernier objectif est le renforcement de l'attractivité du droit français. Sont ainsi abrogées les sûretés inutiles ou obsolètes qui rendaient notre droit illisible depuis l'étranger. Sera par ailleurs mis en place, par décret, un registre unique des sûretés mobilières, librement consultable sur internet, conformément aux meilleurs standards internationaux : il permettra aux créanciers de connaître immédiatement l'ensemble des garanties déjà constituées par celui qui souhaite obtenir du crédit.

Cette réforme, qui est complétée par l'ordonnance présentée à ce même Conseil des ministres portant notamment réforme de l'articulation entre le droit des entreprises en difficulté et le droit des sûretés, entrera en vigueur le 1er janvier 2022 afin de laisser le temps aux opérateurs économiques de s'y adapter. Les dispositions relatives au registre des sûretés mobilières et au gage automobile, qui requièrent à la fois des mesures réglementaires d'application et des développements informatiques nécessaires à leur mise en œuvre, entreront en vigueur à une date qui sera fixée par décret, au plus tard le 1er janvier 2023.

  • Une ordonnance portant modification du livre VI du Code de commerce

Elle est prise également sur le fondement de la loi PACTE. Elle transpose la directive du 20 juin 2019 « restructuration et insolvabilité » (PE et Cons. UE, dir. (UE) 2019/1023, 20 juin 2019). La France sera ainsi l'un des premiers pays de l'Union européenne à transposer cette directive. Par ailleurs, cette ordonnance concrétise plusieurs mesures du plan d'action pour la sortie de crise annoncé par le ministre de l'économie, des finances et de la relance et le garde des Sceaux, ministre de la justice, le 1er juin dernier. Le droit français comporte déjà des outils efficaces en matière de prévention des difficultés des entreprises. L'ordonnance adapte ces outils dans le cadre de la transposition, notamment la procédure de sauvegarde accélérée.

La réforme respecte les équilibres essentiels entre les différents intérêts en cause, notamment ceux des salariés. Elle ne remet pas davantage en cause la finalité des procédures collectives françaises : assurer le maintien de l'activité de l'entreprise, protéger les emplois et assurer le désintéressement des créanciers. Conformément à l'habilitation confiée au Gouvernement, l'ordonnance assure la cohérence de l'ensemble des procédures collectives permettant un maintien de l'activité : sauvegarde accélérée, sauvegarde et redressement judiciaire avec ou sans classes de parties affectées obligatoires.

Au nombre des évolutions majeures imposées par la directive, figure, d'une part, l'organisation des créanciers et, le cas échéant, des détenteurs de capital, en « classes de parties affectées », appelées à voter sur le projet de plan de restructuration, et, d'autre part, la possibilité pour le tribunal d'arrêter un plan en dépit du vote négatif d'une ou plusieurs classes. La transposition de ces deux mécanismes et la modulation des pouvoirs du tribunal en fonction de la procédure (selon que l'entreprise est en sauvegarde ou en redressement judiciaire) se traduiront par un rééquilibrage des pouvoirs des parties prenantes dans le cadre des procédures de traitement des difficultés des entreprises, avec une plus grande place laissée à la négociation entre l'entreprise et ses créanciers. Les accords de restructuration ainsi conclus pourront ainsi être plus équilibrés et respectueux des intérêts des différentes parties prenantes – et donc plus efficaces à long terme. L'efficacité du cadre français de traitement des difficultés des entreprises et son attractivité seront ainsi renforcées.

Dans le même temps, l'ordonnance renforce les dispositifs de détection et de prévention des difficultés des entreprises. Ces mesures visent notamment à assurer une information plus précoce du tribunal et à renforcer l'attractivité de la procédure de conciliation. Le système français de prévention des difficultés des entreprises, dont l'efficacité est reconnue par nos partenaires internationaux, sera ainsi conforté.

Par ailleurs, l'ordonnance renforce le droit à une seconde chance des entrepreneurs individuels, notamment en pérennisant plusieurs mesures adoptées de manière temporaire par l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 pour faire face aux difficultés des entreprises dans le contexte de la crise sanitaire. L'accès aux procédures de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire simplifiée est facilité, permettant un rebond plus rapide des entrepreneurs. Dans le même temps, l'ordonnance renforce la protection des personnes physiques qui se portent garantes d'une entreprise, complétant ainsi sur ce point la réforme des sûretés, mise en œuvre par l'ordonnance, présentée à ce même Conseil des ministres, portant réforme des sûretés.

L'ordonnance modifie, en outre, les droits des créanciers titulaires de sûretés en cas d'ouverture d'une procédure préventive ou collective de traitement des difficultés. Elle favorise une meilleure lisibilité de ces droits, notamment en cas de liquidation judiciaire du débiteur, tout en s'inscrivant dans la continuité du droit positif. La clarification du classement des créances garanties opérée en conséquence est conforme aux conclusions du rapport remis au Premier ministre le 21 avril 2021 par M. René Ricol sur l'articulation entre le régime de garantie des salaires (AGS) et les administrateurs et mandataires judiciaires dans le cadre des procédures collectives.

Le renforcement de la transparence et de la maîtrise des frais de justice, et plus généralement des coûts dans les procédures préventives et collectives de traitement des difficultés des entreprises, est assuré par un ensemble de mesures complémentaires. L'ordonnance impose une meilleure anticipation des frais prévisibles, le décret pris pour son application permettra aux autorités judiciaires d'avoir une connaissance complète des coûts de la procédure de conciliation. Tout en préservant le principe de confidentialité, les dispositions réglementaires relatives à la rémunération des mandataires de justice comporteront de nouvelles règles en facilitant le contrôle et une circulaire exposera le cadre de l'intervention de tiers autres que les mandataires de justice.

Enfin, l'ordonnance pérennise le privilège de sauvegarde et de redressement judiciaire (dit privilège de « post money ») introduit dans le cadre de la crise sanitaire par l'ordonnance du 20 mai 2020, dans le but de faciliter le financement des entreprises faisant l'objet d'une procédure ou d'un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire.

L'ordonnance entrera en vigueur le 1er octobre 2021. Ainsi, dès l'automne, l'ensemble des entreprises pourra bénéficier d'un cadre de restructuration rénové et attractif.