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Le garde des Sceaux s'exprime face au malaise des magistrats

Il est rare que les magistrats sortent de leur réserve comme il est rare qu'Éric Dupond-Moretti convoque la presse. Le garde des Sceaux s'est exprimé le 13 décembre en réaction au malaise des magistrats et des personnels de greffe qui ont appelé à la mobilisation le 15 décembre devant le ministère de l'Économie et des Finances. Ce mouvement pour réclamer des moyens et des effectifs supplémentaires intervient à la suite de la tribune publiée dans le journal Le Monde le 23 novembre dernier, signée par un tiers des magistrats, véritable cri d'alarme sur les conditions de travail et le mal-être de la profession. Si les raisons de la colère sont connues, les moyens pour y remédier tardent à intervenir, selon les professionnels, ou à produire leurs effets. Des « sucres rapides » jugés insuffisants pour répondre aux situations de souffrance et à la perte de sens dénoncée par des professionnels au service d'une justice qualifiée d'« à bout de souffle ».

Deux jours avant la manifestation, le ministre a appelé à un « débat apaisé et sérieux » et a défendu le bilan du Gouvernement depuis le début du quinquennat, - « Ce que nous payons aujourd'hui, c'est le fruit de dizaines d'années d'abandon de la justice humainement, budgétairement et politiquement ». Il a formulé quelques mesures immédiates, tout en remettant « de la nuance » dans les chiffres, et a renvoyé les autres propositions aux États généraux de la Justice ainsi qu'au rapport qui doit être remis en février par Jean-Marc Sauvé et qui se traduira par une nouvelle loi de programmation pluriannuelle.

Les annonces

• Sur la question des effectifs des magistrats : le DSJ interrogera les chefs de cour afin qu'ils indiquent les besoins en magistrats « précis et documentés » ; le ministre souhaite une refonte de la clé de répartition des effectifs et la mise en place d'un outil dédié érigé en chantier prioritaire (selon la Cour des comptes, 3 ans sont nécessaires pour bâtir un tel système) afin de déterminer « le bon nombre de magistrats » ;

• L'augmentation du nombre d'auditeurs de justice recrutés en 2022 est portée à 380 et 80 postes seront ouverts au concours complémentaire, qui se traduiront par une arrivée en juridiction en 2023 (31 mois pour former un magistrat et 18 mois pour un greffier) ;

• Au titre des mesures d'accompagnement et de soutien : au sein de chaque cour d'appel, des psychologues seront déployés et la communication sur le numéro vert accessible 7j/7, 24h/24 renforcée ; un parrainage des jeunes magistrats sera généralisé sur la base du volontariat, en lien avec l'ENM ; un budget dédié et autonome sera accordé à chaque juridiction pour améliorer le bien-être au travail ;

• S'agissant de la justice de proximité, les 1 414 contrats de 3 ans seront pérennisés et de courts modules de formation mis en place à l'ENM.

Sur ce dernier point, le ministre a fait valoir que 2 100 contractuels avaient été engagés cette année en renfort dans les juridictions (dont 834 juristes assistants et 1 077 assistants de justice) qui « ne sont pas des rustines, ni des magistrats ou des greffiers bis ».

Ces renforts sont notamment affectés à la gestiondes stocks, qui renvoie à la lenteur de la justice, « l'une des principales critiques formulées par les citoyens ». Le chef de l'Inspection générale de la justice (IGJ), Jean-François Beynel, a fait un point sur la réalisation en cours d'un diagnostic relatif à l'état des stocks dans les juridictions de première instance et les cours d'appel, qui doit permettre d'expliquer la persistance des stocks, un sujet « ancien, persistant et structurel ». Plusieurs rapports intermédiaires ont été remis cette année mettant en avant différents facteurs : l'organisation des juridictions, l'aggravation des difficultés structurelles des juridictions à gérer leur flux depuis 25 ans, l'absence d'indicateurs fiables sur les stocks et d'outils de pilotage, mais aussi, et en premier lieu, la complexification dans le traitement des affaires. La situation est variable d'une juridiction à l'autre et n'a pas la même traduction au pénal où le développement de la CRPC et des ordonnances pénales a permis de réduire les délais, qu'en matière civile où la situation varie d'un contentieux à l'autre. Pour certains d'entre eux, l'augmentation du nombre des parties et la longueur des écritures des avocats sont notamment des facteurs aggravants selon l'IGJ. « L'insuffisance de moyens est à l'origine de seulement 10 % des stocks en appel et 31,8 % en première instance », a affirmé M. Beynel, tout en soulignant que la grève des avocats et la crise sanitaire avaient eu des conséquences moins importantes que prévu sur les stocks, plutôt absorbés par les juridictions. Un contrat d'objectif a été signé avec chacune des cours d'appel pour ramener les délais à 6 mois.

Deux autres sujets devront être rapidement expertisés : d'une part, les audiences tardives et nocturnes sur lesquelles le DSJ est chargé d'interroger les chefs de cour pour avoir « des éléments précis sur lesquels s'appuyer pour prendre d'éventuelles décisions », et d'autre part, le logiciel Cassiopée dont les dysfonctionnements devront être mieux établis afin de « remédier à ses difficultés chroniques ».

Un diagnostic chiffré. - Le diagnostic sur la situation par les services judiciaires présenté par Paul Huber, directeur des services judiciaires, a mis en exergue des chiffres censés représenter le décalage entre les mesures prises et le ressenti au sein des juridictions. Le DSJ a rappelé que 9 285 magistrats étaient en exercice en 2021 (dont 8 513 en juridictions), soit une augmentation de 698 magistrats depuis 2017. Il a rappelé à cet égard le rapport de la Cour des comptes d'octobre 2021 qui appelait à la prudence sur les comparaisons du nombre de magistrats dans les pays européens, estimant que n'étaient pas pris en compte les juges non professionnels (V. en particulier rapport de la CEPEJ). Le taux de vacances est, par ailleurs, en baisse, passé de 5,77 % en 2017, à 1,39 % en 2021 chez les magistrats et de 7,73 % à 5,97 % chez les greffiers, au nombre de 10 172 en 2021. Les magistrats sont par ailleurs incités au détachement, un passage obligé pour prétendre à l'avancement interne. Au 1er janvier 2021, 278 détachements étaient en cours.

Sur les départs de la profession : 7 démissions ont été enregistrées en 2021, 3 en 2020, zéro en 2018. Les chiffres des arrêts maladie sont disponibles pour les cours d'appel mais pas encore pour les TJ. Enfin, l'ISJ va diligenter une enquête sur le suicide de la jeune magistrate à l'origine du mouvement de la profession.

Le ministre de la Justice, qui a reçu une trentaine de signataires de la tribune au Monde, a martelé vouloir être jugé sur ses actes et non sur ceux de ses prédécesseurs. « À notre arrivée, la justice était en état d'urgence absolue, a-t-il reconnu. Mais pendant ce quinquennat, beaucoup de progrès ont été faits, une marche importante était à franchir sur la transformation numérique, l'équipement et les outils des magistrats et des greffiers, l'accélération des procédures numériques ». Le garde des Sceaux a promis que « les grands projets de modernisation » arrivaient dans les tribunaux en particulier pour alléger le travail des greffiers (procédure pénale numérique, Portalis déployé sur tout le territoire en 2022, suivi des dossiers en ligne dans tous les tribunaux en 2022).

Enfin, le ministre a rappelé une nouvelle fois la « hausse historique » du budget de la justice en se livrant à un comparatif avec les budgets des précédents quinquennats. Sur les sujets de crispation, le ministre s'en remet aux États généraux de la justice que de nombreux professionnels de la justice ont pourtant décidé de boycotter. La question du « combien » et du « comment » est sur la table.

Retrouvez : la présentation de la conférence de presse, le discours du ministre, la synthèse des annonces.